Après avoir chéri cette petite merveille pendant 9 mois, le moment tant attendu est enfin arrivé : vous tenez votre enfant dans vos bras. Les premières nuits passées ensemble sont remplies de moments précieux. Cependant, il arrive parfois que votre petit trésor éprouve des difficultés à se rendormir après s’être réveillé en pleine nuit, ou peut-être que vous souhaitez simplement rester à ses côtés toute la nuit pour le réconforter.
De nos jours, de nombreux parents optent généralement pour le cododo pendant les premiers jours voire les premiers mois de la vie de leur bébé, avant de le faire dormir dans sa propre chambre. Cependant, une question se pose souvent : jusqu’à quel âge est-il acceptable de partager le sommeil avec son enfant ? Pour obtenir des éclaircissements, nous nous tournons vers Héloïse Junier, psychologue spécialisée dans la petite enfance et autrice du livre inspirant intitulé « Le sommeil du jeune enfant » (Dunod). Elle nous guide dans cette réflexion importante.
Jusqu’à quel âge peut-on pratiquer le cododo ?
Il n’y a pas de limite d’âge fixe à laquelle un enfant doit cesser de dormir avec ses parents, car il n’existe pas de règle universelle en la matière. Cela varie considérablement d’un enfant à l’autre et surtout d’une famille à l’autre. Cependant, autour de l’âge de 6 ou 7 ans, souvent vers le CP ou CE1, les enfants développent généralement une volonté nouvelle d’autonomie et d’espace personnel.
À ce stade, s’ils ne sont pas trop anxieux, ils peuvent exprimer spontanément le désir de dormir dans leur propre chambre. C’est un moment où ils ressentent une certaine fierté d’avoir leur propre lit et leur chambre personnalisée.
Ce qui importe le plus, c’est que les deux parents soient d’accord sur cette expérience du cododo, que toute la famille puisse bien dormir et que chaque parent se sente respecté dans ses choix.
À mon avis, le tabou entourant le cododo dans notre société est injustifié. Dormir avec son enfant, même s’il n’est plus un nourrisson, n’est ni meilleur ni moins bon que de le faire dormir dans sa propre chambre, c’est simplement différent. Chaque famille est libre de choisir le mode de sommeil qui lui convient le mieux.
Pourras-tu coucher avec ton enfant quand il grandit ?
Dans notre société, le cododo est souvent valorisé lorsque le nourrisson est encore jeune, généralement jusqu’à environ 6 mois. Cependant, il devient rapidement stigmatisé lorsqu’il se prolonge au-delà de cette période. Cela ressemble un peu à la situation de l’allaitement ! De nombreuses mères me confient se sentir mal à l’aise lorsque le pédiatre leur demande où dort leur bébé alors qu’il a entre 9 et 12 mois. Elles ont l’impression que si elles ne répondent pas « dans son lit », elles seront jugées et étiquetées de manière injuste en tant que mères « fusionnelles » qui ont du mal à couper le cordon. Cela conduit de nombreux parents à hésiter à dormir avec leur enfant, se demandant si cette pratique est réellement saine, se souciant de l’opinion de leur entourage et s’inquiétant de créer de « mauvaises habitudes » pour leur bébé. Il est important de souligner que toutes ces craintes sont infondées.
D’un point de vue préventif, il est à noter que les instances officielles internationales recommandent de faire dormir les nourrissons dans la chambre parentale pendant au moins les six premiers mois, mais dans leur propre lit et non dans le lit des parents. Cette recommandation vise à réduire le risque du syndrome de mort inattendue du nourrisson (SMIN).
Affrontant l’inceste : Briser les barrières du tabou
Dépassons le tabou du sommeil partagé pour les enfants de plus de 12 mois. Ce sujet est au cœur des débats parmi les professionnels de la parentalité. D’un côté, il y a les partisans du cododo, de l’autre, les opposants. En France, dès que l’enfant franchit la barre de sa première année, la majorité des professionnels de l’enfance et de la petite enfance déconseillent et diabolisent le sommeil partagé. Certains vont jusqu’à considérer cette pratique comme immorale, malsaine, voire assimilable à de l’inceste. Cela n’a aucun fondement. À mon sens, ce jugement est purement culturel et lié en partie à la prédominance de la psychanalyse dans notre société, qui tend à attribuer à l’enfant une certaine sexualité pulsionnelle envers son parent, diabolisant ainsi la proximité physique entre l’enfant et son parent.
Il est important de rappeler que les recherches en anthropologie démontrent que dans de nombreuses cultures, les parents dorment avec leurs enfants jusqu’à un âge avancé, parfois au-delà de 10 ans, et que cette pratique est socialement acceptée, voire valorisée. Ces enfants ne dorment ni mieux ni moins bien, et ne présentent pas plus ou moins de troubles du sommeil ou de problématiques psychoaffectives que ceux qui dorment dans leur propre chambre. Il est temps de cesser de blâmer le sommeil partagé. Laissons les parents faire leurs propres choix et vivre leur parentalité selon leurs souhaits. Ils sont déjà suffisamment soumis à des injonctions, parfois injustifiées.